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La production littéraire et érudite de la Renaissance se campa souvent sous le signe du compagnonnage, de la « sodalité » (sodalitas) : les notions d’amitié, de communauté, de collaboration – ou de rivalité – affleurent ainsi dans les projets savants et poétiques de l’époque, en France comme ailleurs. Une équipe internationale de spécialistes des lettres françaises, italiennes et néo-latines présente ici de nouvelles perspectives sur cette caractéristique socio-culturelle des textes renaissants. Elle explore les différentes façons dont se croisèrent la cour, les cercles lettrés et les métiers du livre, les sphères vernaculaire et latine, le milieu local et l’échelle internationale de la République des lettres.
Ce volume est dédié à la mémoire de Philip Ford (1949-2013), Professeur titulaire de Lettres françaises et néo-latines à l’Université de Cambridge et Fellow de Clare College. Il célèbre les échanges intellectuels et la collégialité, voire la « sodalité », que Philip Ford appréciait au plus haut point, tant comme sujet de recherche qu’en tant que valeur vivante et durable de la vie universitaire. Sodalitas litteratorum ajoute la bibliographie de ses études et le texte de sa dernière conférence, à propos de Ronsard, ainsi que des poésies multilingues composées en son honneur.
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Quels sont les rapaces les plus aptes à la chasse aux oiseaux ? Comment faut-il affaiter un faucon nouvellement capturé ? Comment soigner ses maladies et ses blessures ? Voici quelques-unes des questions auxquelles répond Jacques Auguste de Thou (1553-1617) dans son poème scientifique sur la fauconnerie. Dans ce livre admirablement documenté, Ingrid A. R. De Smet présente le texte latin nouvellement établi du Hieracosophioy, sive de re accipitraria libri tres, accompagné de sa première traduction française et d’un commentaire détaillé. Ainsi est-il possible d’accéder sans encombre à cet ouvrage complexe et savant, élaboré à l’époque troublée des guerres de religion et dédicacé, à l’origine, au Duc d’Anjou, puis au Chancelier de Cheverny. Une étude historique éclaircit le contexte socio-culturel, économique, et littéraire de la chasse, notamment la chasse au vol, pour laquelle se passionnaient les rois et grands seigneurs de France et dont s’inspiraient poètes et érudits à la Renaissance.
Auteur de plusieurs travaux sur les lettres néo-latines et françaises des seizième et dix-septième siècles, Ingrid A. R. De Smet offre ici un livre fouillé, illustré de seize planches et riche de quatre index, qui intéressera les amateurs de la fauconnerie et de la littérature cynégétique, ainsi que les spécialistes des études néo-latines et de l’histoire des sciences.
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Issu d’une illustre famille de robe, fils du premier président du Parlement de Paris Christophe de Thou, Jacques-Auguste a acquis une stature éminente dans le monde politique et intellectuel de son époque. S’il l’a établie sur une éducation raffinée qui lui donna le goût de la bibliophilie et l’exerça au mécénat, il l’a étayée grâce à une production poétique impressionnante, bien que méconnue de nos jours, et un réseau de relations érudites, notamment avec le triumvirat de lhumanisme tardif (Joseph Scaliger, Juste Lipse et Isaac Casaubon). Il a également joui de relations familiales efficaces et d’une politique nuptiale bien calculée. Il l’aura enfin récapitulée dans les entreprises respectivement commémorative deson œuvre maîtresse, les Historiae sui temporis, et apologétique de la Vita. Ainsi est-ce dans la réorientation de la carrière ecclésiastique jusqu’à la faillite du cursus honorum parlementaire et dans la tragédie personnelle d’un double veuvage que se dessine le néo-stoïcien, le politique, l’ami des protestants, le poète, l’historien, le mémorialiste, cet homme complexe que fut Jacques-Auguste de Thou.
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Les humanistes et les poètes de la Renaissance s’approprient le discours érotique de l’Antiquité pour le transformer en une érotologie littéraire et artistique dont l’empreinte sur la civilisation européenne a laissé des traces profondes. Fruits du colloque “Eros and the Erotic in neo-Latin Literature” tenu à Clare College, Cambridge, en septembre 1995 les essais rassemblés ici cherchent à relancer le débat sur le traitement de l’érotisme, de ses images et de ses lieux communs, de l’admiration quasi platonicienne à l’obscénité. Le champ couvert est celui de la littérature néo-latine, d’Enea Silvio Piccolomin jusqu’aux expériments poétiques latins d’Arthur Rimbaud. I.A.R De Smet & Ph. J. Ford, Préambule - J.-L.Charlet, Eros et érotisme dans la Cinthia d’Enea Silvio Piccolomini - B. Mesdjian, Eros dans l’Eroticon de T. V. Strozzi - A.Stewart, The Singing Boy and the Scholar: the Various Deaths of Politian - P. J. Ford, Jean Salmon Epithalamiorum Liber and the Delights of Conjugal Love - I. A. R De Smet, Innocence Lost, or the Implications of Reading and Writting (Neo-) Latin Prose Fiction - G. Berger, Dialogue-éros-libertinisme, ou comment l’esprit vient aux filles - R. De Smet, Hadrian Beverland’s De fornicatione cavenda: an adhortatio ad pudicitiam or ad impudicitiam - G.H.Tucker, Rimbaud’s (un)Holy Family? Metrics and Obscenity in Tempus erat ... re-visited.
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La grande originalité de la recherche de Mme De Smet est d’avoir été conduite à travers des textes néo-latins et français, souvent peu connus hors de leurs contrées d’origine: Pays-Bas, France, et même Allemagne et Italie, et de suivre ainsi un filon littéraire qui n’était perceptible qu’au temps où chacun lisait le latin à livre ouvert. A chaque étape, les influences latines, l’Apocoloquintose de Sénèque, le Satiricon, Lucien trouvent d’autres échos dans des œuvres aussi variées que le Somnium de Juste Lippe, le Funus parasiticum de Nicolas Rigault, l’Éponge de Scioppius, les Anti-Coton, les écrits de Casaubon, ceux des amis hollandais de fra Paolo Sarpi, pour aboutir aux satires de Montmaur et de ses critiques, Ménage, Sarasin, ou à l’Histoire comique de Francion.